Les Anciens avaient inventé la Démocratie
Les Modernes y ont ajouté la Liberté
Nous sommes responsables des deux...

lundi 15 juin 2009

Discrimination positive et égalité de droits

Ne dites pas qu'Untel est homosexuel : c'est une discrimination homophobe !
Ne dites pas que tel autre est un Noir : c'est une discrimination raciste !
Ne dites pas que tel autre encore est juif ou musulman : c'est une discrimination confessionnelle !
Ne dites pas qu'il est arabe : c'est une discrimination xénophobe !
Ne dites pas que votre voisin est RMiste : c'est une discrimination sociale !
Ne dites pas que votre chef de service est une femme : c'est une discrimination sexiste !
Ne dites pas que votre cousin est fonctionnaire : c'est une discrimination aussi !
Ne dites pas que votre frère est syndicaliste : c'est encore une discrimination !

Cette liste n'est pas close...

Surtout, ne discriminez personne ! Surtout, laissez tout le monde sur le même plan ! Surtout, abstenez-vous de toute remarque es-qualité : vous tomberiez automatiquement sous le coup de la vaindicte populaire, voire de la loi...

Dans ce monde lisse et fade dans lequel on voudrait nous faire vivre, il importe que chacun respecte l'autre au point de ne surtout pas évoquer de différence, même évidente. Il importe que chacun soit le strict égal de l'autre. Il importe qu'aucun relief ne vienne faire de l'ombre à qui que ce soit.

Ce n'est plus l'égalité, un des trois principes fondateurs de notre République, issu de la Déclaration des Droits de l'Homme de 1789, mais l'égalitarisme. Et c'est déjà une utopie destructrice, dont témoignent les innombrables décisions et actions incompréhensibles de la HALDE, cette institution scélérate et liberticide à souhait.

Mais il y a pire encore. On est passé en quelques mois (quelques années tout au plus) d'un concept de refus de toute discrimination à celui d'une discrimination soit-disant positive : on ne se contente plus de refuser d'admettre les différences entre les individus, on les reconnait à demi-mot et l'on s'en sert pour accorder à certains, souvent minoritaires en nombre, des droits (et des passe-droits) en raison de ces différences-là. Drôle de manière de concevoir l'égalité, dites-moi !

Si je suis commerçant dans un quartier juif de telle grande ville et qu'une Musulmane voilée postule au poste de vendeuse, j'ai toutes les chances de me voir poursuivi pour discrimination si je refuse. Ne suis-je pas propriétaire de mon magasin ? N'ai-je pas, à ce titre, un droit d'exclusion, et particulièrement à l'encontre de cette vendeuse qui fera fuire à coup sûr une partie non négligeable de ma clientèle ? Où est le respect de ma propre liberté dans cette hypothèse ? Où est le respect du droit de propriété ? Au nom de quel principe d'égalité n'ai-je pas la même liberté d'action chez moi que cette personne, totalement fondée, elle, à ne pas me recevoir si je voulais m'imposer chez elle ? Au nom de quel principe d'égalité aurais-je tout à fait le droit de refuser, pour des raisons qui m'appartiennent et qu'on ne me demandera pas, la candidature de telle autre personne "bien française et bien blanche" ? N'est-ce pas discriminatoire à l'égard de cette dernière ?

Et un autre problème se pose avec acuité. Qu'on l'accepte ou qu'on le combatte, tout concept nécessite au départ, pour être compris, de définir sur quelles bases il s'établira : différence par rapport à qui ? Par rapport à quoi ? En fonction de quoi ?

S'il y a différence, c'est qu'il y a une norme. Et, déjà, les difficultés s'installent quand on veut définir ce mot. Qu'est-ce qui est normal ? Qu'est-ce que la normalité ? Un article qu'a fait paraître Franck Boizard sur son blog s'intitule "L'homosexualité est anormale". Que n'a-t-il pas écrit là, le malheureux ! Il a déclenché une polémique parmi ses commentateurs, dont je suis, mais dont certains autres l'ont honni, voire insulté ! C'est qu'il a transgressé un nouveau tabou, le pauvre Franck : il a osé employer le mot "anormal" à l'encontre des homosexuels ! Par le seul titre de son article, il a osé dire que la normalité n'est pas ce comportement-là ! Il a osé; quelle infamie !


Je ne suis pas ici, et je n'écris pas ce billet, pour le défendre. Je lui ai d'ailleurs demandé, et j'ai obtenu de lui, en commentaires sur son site et en a-parte par courriel, certaines explications qui me paraissaient nécessaires dans la mesure où son article ne possédait pas la conclusion qui aurait permis dès sa lecture de constater qu'il ne constituait pas une attaque à l'encontre des homosexuels. Car reconnaître les différences est une chose, et déduire de ces différences des considérations qualitatives en est une autre, que je réprouve totalement cela va sans dire.

Cet exemple est très significatif de la confusion entre norme construite et normalité constatée. Pour ne reprendre que cet exemple, le comportement sexuel normal au sens naturel est celui qui réunit un mâle et une femelle, et donc pour l'espèce humaine un homme et une femme. En ce sens, le titre de l'article de Franck est tout à fait recevable. Mais ça ne signifie en aucune façon qu'il existe ni qu'il soit logique d'admettre une norme sociale, légale, ou même morale, ce qui aurait pour conséquence de condamner socialement, légalement ou même moralement, un ou des comportements différents.

Cette parenthèse sur la notion de norme refermée, j'en reviens au problème de fond de cette discrimination positive que je considère comme à la fois néfaste, injuste, et contre-productive.

Sanctionner, de droit ou de fait, une personne ou un groupe humain, en fonction de ce qu'il est et non de ce qu'il fait pourrait paraître a priori illégitime. Il existe cependant nombre de cas où les spécificités de tel ou tel individu sont incompatibles avec certaines situations. Mon exemple ci-dessus de la vendeuse musulmane dans un quartier à dominance israélite en est un. Et le droit d'exclusion qui s'attache au droit de propriété est lui-même un excellent exemple de justification d'une telle discrimination.

Mais de manière encore bien plus flagrante, la descrimination à l'envers comme celle que certains voudraient nous imposer comme normale, ou normative, est une ineptie intellectuelle. Un exemple des plus frappants, pour un esprit logique, est celui du délégué syndical qui voit son emploi protégé (c'est le terme légal) du seul fait de ses fonctions électives. Poussé à l'extrême, ce principe conduit à des situations comme celle dont j'ai été personnellement témoin dans une grande entreprise où j'ai exercé mon activité. Un magasinier qui se voyait reprochés des écarts de stock importants a eu vent de l'intention de la Direction de le licencier, et ce à quelques semaines des élections professionnelles. Il a aussitôt présenté sa candidature. Elu délégué du personnel, sa direction s'est vue automatiquement dans l'impossibilité de s'en séparer. Oserais-je ajouter que les problèmes de gestion des stocks ont perduré après cette élection ? Voilà un exemple totalement inadmissible. Il y en a beaucoup d'autres.

Cet état d'esprit qui se développe au nom de la sacro-sainte lutte contre les descriminations prend des proportions ubuesques. Et nombre d'associations, constituées en véritables lobbies, en demandent toujours davantage. C'est totalement inadmissible, et c'est une insulte au principe de l'égalité de droits. Car chaque fois que l'on accorde un passe-droit à l'égard d'un groupe d'individus particulier, on bafoue dans le même temps le droit des autres dans le même domaine. Pourquoi un élu syndical ne pourrait-il être sanctionné comme le sont ses collègues dans les mêmes circonstances ? Pourquoi un fonctionnaire serait-il à l'abri du chômage dont sont victimes tant de salariés du secteur privé ? Pourquoi une femme serait-elle favorisée à un poste de travail au détriment des hommes ? Ou l'inverse ? Pourquoi les bénéficiaires des "minima sociaux" seraient-ils prioritaires sur tous les autres dans certaines démarches administratives ? Etc, etc...

Ce sont bien souvent ceux-là même qui hurlent contre les inégalités qui gesticulent dans le même temps pour que l'on accorde à des minorités, supposées fragiles (à voir...), des privilèges qu'ils seraient les premiers à dénoncer s'ils étaient accordés à d'autres. Où est la logique là-dedans ? Où est le respect du droit fondamental là-dedans ? Où est la justice (fût-elle sociale) là-dedans ? Où est le respect des libertés individuelles là-dedans ? Et où est tout simplement l'égalité de droits ?

A méditer...

vendredi 5 juin 2009

Redistribution

Il faut que je me fasse une raison : mes activités "extra-web" sont trop prenantes pour me permettre d'écrire aussi souvent que je le voudrais, et donc pour réagir rapidement à l'actualité. Ca n'est finalement pas très grave : je n'ai pas l'habitude, ni le goût, de commenter "à chaud" les évènements, et je préfère prendre le temps de la réflexion. En outre, un billet écrit sur l'instant n'est finalement qu'un billet parmi d'autres, alors qu'un billet réfléchi et décalé dans le temps incite le lecteur à réfléchir à nouveau, et à se poser de nouvelles questions, sur le sujet traité. Ce n'est pas plus mal en soi...

C'est ainsi que je prétends revenir aujourd'hui sur la grogne des producteurs de lait, qui a défrayé la chronique il y a quelques semaines, et dont plus personne ne parle aujourd'hui tant les médias ont d'autres chats à fouetter, même si la "solution" dont se gargarise notre ministre Barnier ne satisfait personne, et surtout pas les éleveurs eux-mêmes...

Si j'ai choisi de revenir sur cette Nième grogne paysanne, ce n'est pas tant pour l'intérêt qu'elle comporte légitimement en elle-même que parce qu'elle est emblématique de l'incurie et de l'inutilité des politiques de redistribution, qui sont pourtant tellement entrées dans les moeurs, quelle que soit l'obédience de nos dirigeants, qu'elles tendent à s'imposer dans les esprits comme quelque chose de naturel et de normal.

Qu'y a-t-il cependant de naturel ni de normal à spolier arbitrairement et autoritairement les citoyens d'une partie non négligeable du produit (naturel et normal, celui-là) de leur activité, pour la "redistribuer" non moins arbitrairement à ceux d'entre eux dont l'activité ne génère pas un produit suffisant ? Qu'y a-t-il de naturel et de normal à voler les uns au profit des autres ? Et qu'y a-t-il de naturel et de normal à décider arbitrairement que les revenus de ceux-ci sont trop élevés par rapport aux revenus de ceux-là ?

La réalité, c'est que tout ça n'est bien sûr ni naturel ni normal, et ne procède que d'une conception de l'action de l'Etat selon la laquelle ce dernier, réputé omniscient et omnicompétent, serait le seul à même de décider de ce qui est bon ou mauvais pour ses administrés, de qui gagne trop et de qui doit être assisté, de quelle branche moribonde de l'économie doit être mise sous perfusion et à la charge de qui, etc...

Ce type d'économie, dans laquelle l'Etat planifie et régule toute l'activité , dans laquelle il impose la solidarité quand celle-ci n'a de valeur et d'efficacité que librement consentie, dans laquelle il abuse de son autorité pour, n'en doutons pas, servir les intérêts de ses amis contre d'autres, ce type d'économie administrée porte un nom : cela s'appelle le collectivisme, et on sait quel désastre il a engendré et combien sa faillite a plongé certains pays dans un marasme dont ils ont les plus grandes peines à se sortir.

On va bien sûr m'attaquer vertement sur ce que je viens de dire, et prétendre que je noircis le tableau pour des raisons idéologiques. On va bien sûr me dire que la PAC (puisque j'ai parlé des paysans) n'a rien à voir avec l'économie planifiée de l'ex bloc soviétique. On va même sans doute me dire que je n'ai rien compris, et qu'au contraire la Commission de Bruxelles est à l'opposé de cette idéologie, que Manuel Barroso est un libéral, et que c'est sans doute cette soit-disant politique libérale qui est à l'origine des problèmes des agriculteurs.

Il faudra cependant m'expliquer, dans ce cas, en quoi un système d'aide artificielle à une profession toute entière, un système qui fausse de manière avouée, revendiquée, le fonctionnement naturel d'un marché, est un système libéral. Il faudra m'expliquer qu'il existe une vraie différence entre des aides "redistributrices" financées par l'impôt et la collectivisation des ressources, entre socialisme et collectivisme ! Et je gage qu'il va être difficile de m'en convaincre...

Car, j'ai lâché le mot, la politique soit-disant libérale de l'Union Européenne en la matière (mais ce n'est pas le seul exemple), comme d'ailleurs toutes les politiques dites "sociales" des Etats soit-disant libéraux dont la France, sont ni plus ni moins, en réalité, que du socialisme inavoué. Ce n'est pas un gros mot, mais d'une part ceux qui mettent en oeuvre ses principes seraient bien inspirés de l'admettre officiellement, et d'autre part leur application depuis des décennies est l'argument le plus convaincant de leur caractère néfaste au regard des difficultés que nous vivons (et pas seulement à cause de la crise économique et financière mondiale).

Car, pour en revenir aux producteurs de lait, quel est le vrai problème ? C'est un problème de marché. C'est le problème d'un marché (celui du lait) qui présente plusieurs aspects que nos producteurs n'ont pas su appréhender, bien aidés en cela par nombre d'opérateurs politiques ou économiques qui n'ont vu que leurs propres intérêts, et qui ont utilisé (et continuent de le faire) la souffrance paysane à leur profit :

1) L'élevage bovin à vocation laitière est une activité qui, outre qu'elle demande un investissement humain important (beaucoup de travail et de contraintes horaires), est soumise à des normes d'hygiène et de salubrité, à l'existence d'installations très techniques, qui alourdissent considérablement les coûts d'exploitation. Ces normes sont utiles et bienfondées, mais ne sont pas respectées dans nombre de pays étrangers dont les producteurs entrent ainsi en concurrence déloyale avec nos éleveurs.

2) Comme pour toutes les activités en Europe, les charges qui pèsent sur les salaires comme sur le chiffre d'affaires des agriculteurs sont éminament supérieures à celles que supportent nos concurrents étrangers. L'explication est partiellement représentée par la protection sociale. Je ne reviendrai pas ici sur le principe, mais voici encore un exemple de mesures qui ruinent ceux qu'elles sont sensées protéger.

3) Le marché (la consommation des produits laitiers) se resserre d'année en année, même si l'année 2008 a été un contre-exemple qui a permis une progression des cours mondiaux. Ce fut une exception notable, mais il y a au niveau mondial un problème de surproduction au long cours.

C'est pour palier ces difficultés (qui ne datent pas d'hier !) que la Politique Agricole Commune de l'Union Européenne a été créée. L'idée était simple, quelle que soit l'opinion qualitative que l'on s'en fait. Il s'agissait de compenser le niveau des cours mondiaux (trop faibles pour que les exploitations européennes soient rentables) par des aides communautaires. Au final, l'agriculteur vendait ainsi ses produits à des prix qui étaient sensés lui assurer un revenu suffisant.

Bien entendu, ces aides communautaires sont financés par les états membres, et donc par l'impôt. C'est en cela que je les assimile tout naturellement à une politique de redistribution.

Au premier abord, l'idée peut paraître séduisante à certains. Elle a d'ailleurs fonctionné tant bien que mal pendant de nombreuses années, ces années de croisance forte que l'on a pu appeler les "trente glorieuses". Mais le monde a changé, et les années que nous vivons sont bien moins "glorieuses" ! Sans encore une fois parler de la grande crise dépressionnaire que nous vivons, l'économie mondiale a eu bien du mal à supporter trois "chocs pétroliers" et des bouleversements géopolitiques importants, et l'ouverture des frontières, très positive par ailleurs à bien des égards, a accentué de manière importante la concurrence internationale. Les produits agricoles ne font pas exception à la règle, et les disparités que j'ai citées plus haut entre nos exploitations et celles d'une grande partie du reste du monde font qu'il y a désormais un gouffre entre les prix de revient de nos agriculteurs, et notamment de nos éleveurs, et ceux de leurs concurrents.

Pour me résumer, nous avons une agriculture qui produit trop et trop cher, et des instances étatiques et communautaires qui continuent de procéder comme si rien n'avait évolué. Le coût global des aides publiques est donc de plus en plus important, et pour s'en tirer les états n'ont d'autre alternative que d'envisager une réduction drastique de ces aides, s'ils ne veulent pas tout simplement les remettre en cause.

Gouverner, c'est prévoir. Gouverner, c'est aussi s'adapter. C'est vrai pour un état. C'est vrai pour un chef d'entreprise. Et un agriculteur est un chef d'entreprise. Faute d'avoir prévu (à cause de ce soutien artificiel qui a faussé leur marché intra-européen depuis des décennies), il leur appartient aujourd'hui de s'adapter ! Et ce n'est certainement pas aux Etats, ni à l'Union, de persister dans l'erreur qui consisterait à les maintenir sous perfusion avec des fonds qui ne feraient qu'accroître les déficits et les difficultés budgétaires ! Mais c'est pourtant la route que semblent bien emprunter nos dirigeants dans une gestion durablement calamiteuse du problème...

La solution, la seule valable, serait :

1) Pour l'Union de veiller enfin à la loyauté de la concurrence des pays étrangers : la préférence communautaire que prônent certains, dont je suis, ne consiste pas à fermer les frontières de l'Europe aux produits étrangers, mais à élever des frontières douanières à l'égard des pays qui produisent dans des conditions fiscales et sociales qui leur permettent des coûts de revient ridicules par rapport aux nôtres. C'est là une forme de concurrence déloyale que nous devons combattre efficacement, quitte à se battre contre l'OMC. Nous avons des arguments !...

2) Pour les producteurs à adapter leurs volumes de production à la demande. On les entend crier à tue-tête contre la suppression programmée des quotas laitiers. Mais qu'ont-ils besoin de ces quotas imposés pour se limiter, et pour éviter ainsi la surproduction et l'effondrement des cours ? On les entend (j'en côtoie un certain nombre) se plaindre qu'à cause de la PAC, ils seraient devenus "des fonctionnaires". Il y a quelque chose de vrai là-dedans ! Mais alors, qu'ils ne demandent pas qu'on les encadre et qu'on gère leurs exploitations à leur place ! Qu'ils soient responsables ! Ils seront alors libres !

On ne peut pas demander chaque chose et son contraire. On ne peut pas dans le même temps critiquer les aides publiques, et ces politiques de redistribution illégitimes autant qu'inefficaces, et réclamer l'assistanat des pouvoirs publics !

Et ce que je viens de dire pour les agriculteurs vaut tout autant pour les industriels. L'interventionnisme forcené actuel, dont la crise mondiale fournit l'alibi à nos dirigeants, nous conduira immanquablement aux mêmes difficultés. Avec leur même cortège de désillusions et de misère...