Et c'est reparti ! On devrait en avoir l'habitude, et je ne devrais même pas écrire sur le sujet, devenu d'une banalité à pleurer : demain 19 mars 2009 sera un nouveau jour de mobilisation syndicale. Entendez par là une nouvelle journée de galère pour les travailleurs (ceux qui bossent, pas les autres évidemment), de blocage pour l'économie française, de manque à gagner pour les entreprises, et par conséquent pour le trésor public, c'est à dire pour les citoyens, c'est à dire y compris pour les grévistes eux-mêmes. Mais sont-ils tous à même de réfléchir jusque là ?
En temps de crise (et celle-là, c'en est une !), on pourrait s'attendre à ce que tout le monde relève ses manches. Quand un orage se lève, le réflexe est de mettre à l'abri les objets sensibles à l'eau, pas d'arroser copieusement pour en rajouter...
Et bien, il faut croire que nous n'avons pas fait la bonne école, tous ceux qui comme moi pensent dans ces termes-là ! Soutenus par 74 % des Français selon un sondage dont on nous rebat les oreilles, tout ce qui compte de forces soi-disant "progressistes" dans ce pays se mobilise pour ... cesser le travail et bloquer l'activité !
On va sans doute encore me reprocher de "taper sur les syndicats", dont je serais paraît-il un adversaire inconditionnel. Il n'en est rien, et ceux qui me connaissent savent que je les considère comme des institutions indispensables au bon fonctionnement de la démocratie. Encore faudrait-il qu'ils soient responsables et qu'ils restent dans leur rôle, deux conditions qui ne sont pas réunies en France, où ils ne savent que défendre leurs intérêts corporatistes respectifs au mépris des intérêts de ceux qu'ils sont sensés représenter. Les organisations en question n'ont de syndicats que le nom. La raison première en est sans doute leur trop faible représentativité, mais ce problème n'est pas celui que je me propose de traiter aujourd'hui.
Et d'ailleurs le sujet de ce billet déborde de beaucoup le cadre de l'action syndicale.
Car cette grève n'en est pas une au sens strict. Il ne s'agit pas, en effet, de faire pression sur un ou des employeur(s) pour obtenir des avantages ou pour les conserver. Il s'agit tout bonnement de faire pression sur le patronat, les pouvoirs publics, et en résumé sur tous les centres de pouvoir, pour en obtenir ce que l'activité économique n'offre plus suffisamment dans cette période de crise.
En d'autre termes, il s'agit tout bonnement d'une grève contre la crise. Voilà un concept tout à fait novateur ! A quand une grève contre les mauvaises conditions météorologiques, l'épidémide de sida ou encore la pollution ?...
La réalité est bien plus prosaïque et beaucoup plus inadmissible encore : les syndicats sont totalement sortis de leur rôle, et il s'agit là d'une grève politique qui ne veut pas dire son nom.
La grève du 29 janvier dernier, sur le même thème, avait amené le "sommet social" du 18 février au cours duquel le gouvernement avait accepté 2,6 milliards d'euros de mesures de relance par la consommation. Je n'ai pas besoin de répéter ici ce que je pense de telles mesures : totalement inefficaces sur le long ou même le moyen terme, et uniquement un cautère sur une jambe de bois à court terme, qui donne l'illusion, mais l'illusion seulement, d'un coup de pouce. Mais c'est ce que demandaient les "partenaires sociaux". C'est ce qu'ils ont obtenu. Et c'est ce qu'ils considèrent évidemment insuffisant...
Ils avaient prévu le "mouvement" du 19 mars dès avant ce sommet. Ils l'ont confirmé quasi immédiatement. Pas étonnant que Laurence Parisot dénonce "leur démagogie", même si je ne tiens pas à prendre exagérément position pour le Medef, qui n'est pas exempt lui non plus de critiques...
Il reste que, comme je l'ai dit plus haut, ce mouvement de grèves est politique avant d'être revendicatif. Il n'est qu'à voir les positions prises par les partis d'opposition, du PS au NPA et passant par le PC ou même le Modem. Le mot d'ordre est simple et récurant : le "tout sauf Sarko" de la campagne présidentielle n'est pas mort avec l'élection, et tous tentent de récupérer l'action pseudo-syndicale à leur profit. A commencer par Besancenot, qui s'est pourtant fait remonter les bretelles de son bleu de chauffe par François Chérèque.
Il est vrai que le danger venant de lui est des plus importants : la face cachée du mouvement est bel et bien la lutte contre un système, le capitalisme libéral, dont le parti du petit facteur poupin de Neuilly se fait le pourfendeur. Et il est bien normal que les forts en math de la planète rouge (ou rose) refusent une telle mise en facteur commun...
Plus sérieusement, on peut à bon droit se demander si tout ce beau monde est de bonne foi ou s'il ne fait que "surfer" sur la vague de mécontentement que provoque la crise économique. Car les difficultés sont évidentes, et il ne s'agit nullement de les nier. Il existe des situations catastrophiques pour nombre de nos concitoyens. Ca en signifie pas que des solutions existent pour tout le monde. Ca ne signifie pas non plus qu'il faille ne rien faire pour personne. Le gouvernement en a pris la mesure, ce me semble, et aussi inefficaces à moyen terme qu'elles puissent être, les mesures annoncées le 18 février vont dans le bon sens à très court terme. Et celles qui avaient été décidées avant, en soutien à l'investissement, auront sans doute encore bien plus d'effets. Elles auraient dû être de nature à permettre de calmer les esprits. Les responsables politiques comme syndicaux ont fait tout l'inverse. C'est le signe de leur incompétence et de leur inconséquence. Malheureusement, ils ne seront pas les seuls à en subir les dommages...
Car ce mouvement de mauvaise humeur ne résoudra évidemment rien, bien au contraire. Il n'assagira pas, par exemple, les manifestants radicaux de l'enseignement supérieur, ni ne feront cesser leurs exactions. Il ne résoudra pas non plus les problèmes rencontrés par l'usager des services publics, pourtant soi-disant "défendus" par les coureurs de rues de tout poil. Il ne pourra évidemment que favoriser les revendications inconsidérées et démagogiques de tous ordres, trop souvent relayées par les ministres eux-mêmes, que leur "patron" doit recadrer régulièrement.
Et en tout état de cause, il ne pourra que porter un nouveau mauvais coup à l'activité de nos entreprises, dont les dirigeants syndicalistes devraient pourtant être les premiers à savoir qu'elles sont les seuls garantes de la sortie de crise, et dès lors d'un bon niveau d'emploi et de pouvoir d'achat retrouvé pour leurs adhérents. Ce n'est certes pas en pénalisant leur activité qu'ils rendront service à leurs ouailles. Mais je suis convaincu qu'ils le savent très bien, et qu'ils disent le contraire dans le seul but de justifier leur propre existance, incapables qu'ils sont de le faire autrement...
Heureusement, malgré tous les reproches que j'adresse régulièrement à nos dirigeants, ils semblent sur ce coup-là vouloir garder le bon cap, et on peut espérer, raisonnablement toutefois (ils nous ont déjà souvent surpris dans le mauvais sens), qu'ils sauront s'y maintenir.
Certains maladroits appellent aux armes les citoyens. Leur jour de gloire n'est pas encore arrivé...
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Nous sommes responsables des deux...
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Du "grand" Foulon, comme d'habitude.
RépondreSupprimerQui prend sans doute plus de 2 millions de ses concitoyens qui vont être dans les rues demain à travers 200 villes de France, pour une bande de niais....
C'est vrai qu'ils n'ont pas tous la chance de lire M. Foulon.....
Mais quand M. Foulon écrit ceci:
"Encore faudrait-il qu'ils soient responsables et qu'ils restent dans leur rôle, deux conditions qui ne sont pas réunies en France, où ils ne savent que défendre leurs intérêts corporatistes respectifs au mépris des intérêts de ceux qu'ils sont sensés représenter."
Il oublie tout juste de préciser que par exemple le Syndicat CfTC de Continental (ramassis de gauchistes comme chacun sait...) se mord les doigts maintenant d'avoir signer un accord contractuel (n'est-ce pas...) qui était tellement contractuel que la Direction l'a rompu unilatéralement.
Et le Medef qui parle de démagogie, n'a encore rien dit, à ma connaissance, de ce patron qui lui aussi unilatéralement, a rompu les contrats de travail de ses salariés en coupant leur paye en deux et en renvoyant le payement de la seconde partie au 11 du mois suivant.
Continuez M. Foulon de nous vanter l'esprit des "entrepreneurs"....
jf.
Bonjour Jacques,
RépondreSupprimerUne fois de plus (vous vous répétez à l'envi), je ne prends personne pour des niais ou des imbéciles. Et pas plus les "2 millions de [mes] concitoyens qui vont être dans les rues [aujourd'hui]". Au passage, nous ne verrons que ce soir si votre boule de cristal est performante, mais là n'est pas le problème.
Ensuite, vous n'avez semble-t-il trouvé à m'opposer, pour me contredire, que deux comportements patronaux contestables, au prime abord tout au moins, et le silence du Medef à leurs sujets.
J'ai bien dit dans mon billet que "je ne tiens pas à prendre exagérément position pour le Medef, qui n'est pas exempt lui non plus de critiques". Et de toute manière, prendre deux contre-exemples parmi des milliers de situations n'a jamais été digne d'une démonstration. De la vôtre pas plus que d'autres.
Sur ces deux "affaires", je suis bien d'accord pour dire qu'il va de soi que, s'il était avéré que des accords contractuels ont été violés, ceux qui l'ont fait devraient être poursuivis, et leurs décisions cassées.
Mais, ne vous en déplaise, ce ne sont certainement pas ces deux exemples-là, même avérés, qui me feront cesser d'affirmer que l'entreprise est la base même de l'économie, qu'elle est seule garante de la production de richesses, et que les syndicats français ne sont que des "machines à foutre le b...." sans aucune aptitude au raisonnable et au constructif.
Bravo René pour ce billet complet, avec tous les liens pour aller appréhender la réalité de la situation.
RépondreSupprimerrien à ajouter, si ce n'est que l'on sait déjà que le gouvernement ne tient pas le bon cap : Pécresse recule chaque jour un peu plus, le non-remplacement de 1 fonctionnaire sur 2 ne sera pas effectif, etc. etc....
nous verrons, mais je ne crois pas trop au bras de fer sur ce coup là.
à bientôt
Bonjour Lomig,
RépondreSupprimerTu as raison au sujet des incessantes reculades du gouvernement. Je les ai déjà dénoncées moi aussi.
Quand je parlais de "tenir le bon cap", je ne faisais référence qu'aux déclarations de Fillion et de Sarkozy au sujet du mouvement de grève d'aujourd'hui. Et j'ai bien pris soin d'ajouter qu'ils "nous ont déjà souvent surpris dans le mauvais sens"
A bientôt
Et si nous faisions grève ... contre la grève ?
RépondreSupprimerBonjour liliba
RépondreSupprimerMerci d'être passée par ici. Intellectuellement, l'idée me séduit. Il faudrait voir comment on fait en pratique...
Je fais la grève de la grève : je travaille !
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