Les Anciens avaient inventé la Démocratie
Les Modernes y ont ajouté la Liberté
Nous sommes responsables des deux...

jeudi 26 mars 2009

La paranoïa continue

Dans le sillage de mon billet du 24 mars, deux articles de presse ont particulièrement attiré mon attention ce matin.

1) Un article de
L'Express.fr sur "l'affaire" des stock-options chez GDF-Suez

Cette entreprise, GDF-Suez, qui a présenté sur l'exercice 2008 un excédent d'exploitation, et qui prévoit d'embaucher 8000 personnes en France au cours de son exercice 2009, a préparé un plan de distribution de stock-options qui a fait immédiatement réagir la presse et le monde politique, même si Patrick Devedjian, interrogé en sa qualité de ministre de la relance, s'est montré plutôt prudent sur la question en déclarant


"C'est une entreprise qui gagne de l'argent. C'est une entreprise qui embauche. Que les dirigeants soient encouragés, cela ne me choque pas. Maintenant il faut que cela soit dans une mesure raisonnable".
Il faut noter que le plan de stock-options dont on parle ne concerne pas uniquement les deux dirigeants stigmatisés, mais en tout 8000 collaborateurs de l'entreprise. Excusez du peu...

Il convient également de noter que GDF-Suez n'a reçu aucune aide de l'Etat.


Voilà donc une décision qui relève de la liberté contractuelle, et qui ne comporte, de mon point de vue et objectivement, aucune raison de critique fondée. Comme je l'ai expliqué dans mon billet précédent, les stock-options sont un excellent moyen d'intéresser les salariés à la bonne marche de l'entreprise. Et quand il s'agit d'une entreprise bénéficiaire et qui embauche, critiquer une telle mesure relève directement de la démagogie la plus primaire.

Maintenant, il faut noter également que l'état est actionnaire de l'entreprise à hauteur de 35,7 %. La décision votée par le conseil d'administration l'a donc été avec l'assentiment des administrateurs de l'état, qui possédaient avec ce pourcentage la minorité de blocage. Ceci étant dit pour déborder par avance sur l'article de presse suivant.

2) Un article du Figaro.fr sur la poursuite de la paranoïa anti-patronale

Le torchon continue de brûler en N. Sarkozy et L. Parisot. Et on peut comprendre l'un comme l'autre.

En effet, si le Medef est totalement fondé à refuser de se laisser imposer un diktat ou de subir les oukases d'un Président qui se prend pour Dieu le Père au nom d'une morale qu'il croit universelle, l'Etat n'a pas non plus vocation à distribuer l'argent du contribuable à des dirigeants qui ont failli.

Je ne vais pas refaire mon billet d'avant-hier, mais on peut parfaitement comprendre que les patrons des entreprises qui ont reçu des subsides dans le cadre du plan anti-crise se voient contester le versement de bonus et de stock-options. Encore faut-il bien vérifier que le versement de ces salaires complémentaires soit légalement attaquable, en fonction des contrats de travail d'une part, de la convention passée avec l'Etat d'autre part. Et la sentence présidentielle qui consiste à dire "Si le Medef n'y va pas, nous irons par la loi" risque bien de n'être qu'une fanfaronnade de plus. Il suffirait pour ça que les conventions passées avec les entreprises concernées soient restée totalement muettes sur le sujet. Ces conventions, elles aussi, sont de nature contracturelle, et prétendre que "Le gouvernement va reprendre les différentes conventions passées entre l'État et les entreprises qu'il aide" n'a pas beaucoup de sens. Un contrat ne peut être révisé que par l'accord de toutes les parties signataires. Il fallait mieux rédiger ces conventions dès le départ, si l'on voulait éviter de telles décisions, par ailleurs en effet hautement criticables. Nous sommes encore dans un état de droit, que je sache...

Pour ce qui est du reste du discours, je serais beaucoup plus nuancé. Revoir par la loi le mode de répartition des richesses produites est plus que criticable en ce qu'il empiète sur la liberté d'action liée au droit de propritété, mais reste du domaine du possible constitutionnellement parlant.

Et s'il s'agit d'instituer, comme on a pu le comprendre il y a quelques temps, un sytème de participation remanié par rapport à celui qui existe aujourd'hui, et qui peut paraître trop restreint, même si le nouveau système englobe des dispositions particulières à l'égard des dirigeants, le débat peut être ouvert. Si, par la négociation, un consensus peut être trouvé dans cette direction, ça peut être finalement un pis-aller pas trop négatif.

Mais vouloir passer en force constituerait deux forfaits majeurs : une violation de la liberté liée au droit de propriété et une ingérance insupportable dans la gestion des entreprises privées.

A entendre certains discours, et pas seulement des politiciens, on pourait croire qu'on se trouve (d'ores et déjà) dans un système étatique autoritaire, et cette simple impression est en elle-même intolérable.

A lire absolument :

-
un article de Lolik que je viens de découvir après avoir écrit ce qui précède, et qui éclaire le sujet d'un jour tout à fait intéressant.
- et un autre de Franck Boizard qui ne manque pas non plus de pertinence
- et encore un de Lomig (que j'ajoute aujourd'hui 27 mars)
qui complète le sujet


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mardi 24 mars 2009

Liberté contractuelle et jugement moral

L'actualité est riche en prises de positions plus ou moins (plutôt moins que plus) réfléchies ou même admissibles au sujet des salaires des "patrons".

Le joyeux concert joué par les syndicats, le Medef, le gouvernement et même le Président est étonnant de cohérence ... et d'irrecevabilité, tant légale que logique, et j'oserais ajouter que morale, même si je considère que la morale n'a rien à faire dans les considérations d'ordre politique.

Car enfin, de quoi s'agit-il ?

Légalement, le dirigeant d'une entreprise, quelle que soit sa taille, est un salarié comme les autres. Son contrat de travail, conclu entre lui et son employeur, est un contrat de droit privé qui constate un certain nombre d'engagements réciproques et qui fait la loi des parties, dès lors évidemment qu'il ne contrevient pas aux lois et règlements en vigueur, et donc, en la matière spécifique, au Code du Travail. Et que je sache, ni les bonus ni les stock options ne sont contraires au droit du travail. Au contraire, ils sont expressément encadrés par lui...

Comme tout contrat, ce contrat de travail n'engage que ses signataires, à savoir l'entreprise d'une part, représentée par son Conseil d'administration, lui-même l'émanation de l'assemblée générale des actionnaires, et le salarié, en l'occurence le patron dont on parle. Il ne regarde, ce contrat, ni les syndicats (sauf peut-être, s'il le saisit, celui auquel ce patron est affilié), ni le Medef, ni le gouvernement, ni les journalistes, ni l'opinion publique.

Que ce soient la Société Générale, Valéo, ou n'importe quelle autre entreprise privée, il s'agit d'entités juridiques qui appartiennent à leurs actionnaires, lesquels jouissent donc par définition d'un droit de propriété sur leur bien, droit qui leur confère par nature l'exclusivité des décisions de gestion.

Le droit de propriété est un des fondements de base de notre droit, partie intégrante et fondatrice de la liberté individuelle, et il est proprement insupportable de voir à quel point il est contesté et bafoué à longueur de temps. En paroles le plus souvent. Mais en actes également, et en intentions de plus en plus précises ces temps-ci...

Je peux parfaitement comprendre l'émoi des citoyens, plongés dans la crise mondiale et dans les difficultés économiques qu'elle engendre pour le commun des mortels, devant les annonces de sommes qu'ils ressentent comme faramineuses, distribuées à ces patrons qu'ils appréhendent comme des nantis et qu'ils tiennent souvent pour responsables de la crise. Sauf cas particuliers, il n'en est rien mais ce sont là de bien pratiques boucs-émissaires expiatoires de tous les maux, et c'est presque par réflexe que les "petites gens" les montrent du doigt.

Je peux parfaitement comprendre l'erreur de ces citoyens-là. Je ne peux par contre absolument pas comprendre ceux qui abondent dans leur sens et qui propagent ainsi le sentiment que ce sont là des profiteurs dont les revenus sont monstrueux et illégitimes. C'est de la pure démagogie, et même s'il s'agit là d'un sport national, ça n'en est pas moins irritant...

Quelles sont les pommes de discorde ? Il y a trois sujets qui reviennent régulièrement pour être montrés du doigt et remis en cause :

1) Les bonus

Il s'agit d'une partie fluctuante du salaire, l'idée étant d'indexer cette part de la rémunération sur les résultats de l'entreprise. C'est en quelque sorte une prime à l'efficacité, et en cela je la trouve très intelligente.

Les seuls défauts qu'on peut lui reprocher : le bonus n'est pas traité comme un salaire : il n'est imposé qu'à 33 %, soit nettement moins que le salaire fixe, et il n'est pas soumis à cotisations sociales. Je considère pour ma part qu'il devrait être traité comme le reste du salaire.

En outre, il est par nature lié aux bons résultats de l'entreprise, et il n'a pas vocation à être versé lorsqu'elle présente de mauvais résultats.

2) Les "parachutes"

C'est une indemnité dont le montant est fixé par avance, à la signature du contrat de travail, versée lors de la rupture de ce contrat. L'idée est de prémunir le dirigeant concerné des conséquences d'un licenciement qui ne serait pas lié directement à sa gestion, comme cela se passe quelquefois lors de différents personnels avec un ou plusieurs actionnaires.

Sur le fond, je pense quant à moi que le risque existe bel et bien à ce niveau de responsabilités, et que cette pratique peut parfaitement se comprendre. Mais là encore, il est totalement anormal que ces "parachutes" soient versés en cas de résultats désastreux dues à la mauvaise gestion, voire en cas de malversations, comme on a pu l'entendre ça et là.

3) Les stock options

Il s'agit là encore d'une partie de la rémunération, mais versée sous forme d'une option d'achat d'actions de l'entreprise. Le bénéficiaire (le salarié) se voit offir la possibilité d'acquérir un certain nombre d'actions à un prix fixé dans l'accord, quel qu'en soit le cours de bourse au moment de l'achat effectif. Il peut ainsi être amené à réaliser une plus-value plus ou moins importante en fonction de l'évolution du cours de l'action. Par contre, il ne prend pas le risque d'une perte car il est évident qu'en cas de baisse du cours, il ne "lèvera" pas son option, c'est à dire qu'il n'achètera pas les actions.


Il s'agit d'un bon moyen d'intéresser le salarié à la bonne santé de son entreprise, tout en lui constituant un complément de revenus possiblement important. Il est tout à fait adapté à la rémunétration des dirigeants, la bonne marche de l'entreprise étant directment liée à la qualité de leur action à sa tête.

Le fonctionnement du dispositif est assez complexe. On en trouvera ici les détails. Personnellement, je regrette, à l'instar des bonus, que les plus-values réalisées sur ces "stock options" ne soient pas traitées comme un salaire, et ne soient soumises qu'à une fiscalité réduite.

D'une manière générale, je maintiens que dans ce pays les prélèvements obligatoires, et en particulier sur les salaires, sont ahurissants et confiscatoires. Je trouve cependant totalement anormal que tous ne soient pas traités de la même manière, d'autant qu'ici ce sont les plus hautes rémunérations qui se retrouvent avantagées.

Mais la tendance du discours actuel n'en reste pas moins scandaleuse, en ce sens qu'elle tend à dire ouvertement que l'état serait fondé à intervenir dans des décisions et des accords qui relèvent du domaine contractuel, c'est à dire du libre exercice de la liberté d'un propriétaire (celui de l'entreprise, c'est à dire l'actionnaire) à disposer de son bien.

Tant que les stipulations d'un contrat, quel qu'il soit, ne sont pas contraires à la loi, leur mise en application ne relève que des parties contractantes, et les velléités d'interventions étatiques martelées ces temps-ci sont proprement exaspérantes.

On peut parfaitement concevoir, évidemment, que les aides publiques du plan de relance anti-crise du gouvernement, dont il y aurait beaucoup à dire par ailleurs, sous forme de prêts ou de subventions, soient conditionnées à tel ou tel abandon des bonus, stock options et autres "parachutes dorés". Il est totalement inadmissible en effet, de mon point de vue, que l'argent du contribuable serve à alimenter les compléments de revenus des dirigeants des entreprises en difficulté. Encore faudrait-il pour cela que le contrat qui est passé entre l'entreprise aidée et l'état le stipule expressément. Est-ce que c'est bien le cas ?

On ne peut pas concevoir, par contre, que l'état s'érige en Commandeur et dicte leur conduite à des entreprises indépendantes, qui par ailleurs ne demandent rien au Trésor Public, dans le cadre de l'application des contrats qui les lient à leurs dirigeants. Pas plus que cela ne soit concevable de la part du Medef, et encore moins des syndicats de salariés.

Qu'une loi vienne à être votée pour aller dans le sens de telles interdictions dans des entreprises en difficulté, ou qui licencient, ou qui ont recours à des mesures de chômage partiel, comme il est envisagé, peut paraître moralement fondé à certains. Politiquement néanmoins, il s'agirait cependant d'une ingérance difficilement acceptable dans la gestion et la gouvernance des entreprises. Et en tout état de cause, il n'est pas admissible que ces dispositions s'appliquent aux contrats existants, contrairement à ce à quoi s'attendent, n'en doutons pas, tous ceux qui aspirent à une telle révision de la législation.

Si le droit de propriété et la liberté d'entreprendre veulent encore dire quelque chose dans ce pays, il faut s'insurger par avance contre toute incursion des pouvoirs publics dans le domaine contractuel. Ce serait un scandale sans précédent si le législateur, sous l'impulsion de l'opinion relayée par l'exécutif, osait bafouer ainsi les principes fondamentaux du droit.

Une fois de plus, on assiste à une montée en puissance de l'idée selon laquelle la morale devrait inspirer la loi. La morale est subjective et fluctuante. Le propre de la loi est d'être pérenne et de s'appliquer à tous. Les deux sont donc antinomiques. Chaque fois que le législateur, en France comme ailleurs, s'appuie sur la morale pour se déterminer, on assiste à une dérive totalitaire. Le sujet qui m'occupe aujourd'hui ne fait pas exception à la règle.

Un dernier mot pour ajouter que, à titre personnel, je considère que les dirigeants d'une entreprise en difficulté, a fortiori si elle est amenée à réduire ses effectifs ou à recourir à des mesures de chômage partiel, n'ont aucune légitimité morale à se voter de telles indemnités, même contractuelles. Mais j'ai bien parlé seulement de légitimité morale. Légalement, ces indemnités leur sont dues contractuellement. Nul n'est fondé à les en priver de force.


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vendredi 20 mars 2009

Courage, maintenant !

Ainsi, les manifestations d'hier seraient un succès...

Un succès pour qui ? C'est selon.

Tout d'abord un succès pour les syndicats et les organisations politiques qui avaient appelé à cette "grève" (j'ai déjà dit ce que j'en pensais, je n'insiste pas). C'est une évidence.

Ensuite, est-ce un succès pour les manifestants et ceux qui les soutiennent ? C'est moins sûr, et ça dépend essentiellement de l'attitude du gouvernement dans les prochains jours. Il semblerait, si l'on s'en tient à l'intervention de François Fillion hier soir
sur TF1, que le discours soit celui de la fermeté et du maintien du bon cap. Nous verrons...

Enfin, est-ce un succès pour le pays ? Là encore, l'attitude de Nicolas Sarkozy et du gouvernement en décideront.

Car non seulement il importe que le cap des réformes soit maintenu, il importe qu'aucun plan de relance supplémentaire, c'est à dire aucun aggravement du déficit budgétaire déjà si abyssal, c'est à dire aucune augmentation des prélèvements obligatoires déjà ignoblement lourds, ne soient décidés sous la pression de la rue. Mais encore faut-il tirer les conséquence de l'inconséquence : celle des "meneurs" comme celle des "menés".

Comme l'ont parfaitement exprimé
Lolik et Lomig dans deux très bons articles avant même les manifestations de rue, la meilleure réponse à cette "mobilisation syndicale" qui n'était en fait qu'une fronde à motivation essentiellement politique, consiste à continuer courageusement les réformes entreprises, et même à les amplifier non moins courageusement.

La meilleur réponse est contenue dans l'adage populaire selon lequel il importe de "bien faire et laisser dire".

On pourrait à la limite, sinon comprendre du moins expliquer, une "politique de la marche arrière" dont le but serait de ménager la paix sociale. Mais dès lors que cette même paix sociale est mise à mal par des manifestations aussi importantes que déraisonnables, on ne voit plus très bien au nom de quelle prudence coupable nos gouvernants se dispenseraient désormais de mener à bien les réformes profondes dont le pays a tant besoin. Même s'il faut engager un vrai bras de fer, et si nécessaire au mépris de leur avenir politique.

Il s'agit donc pour eux d'avoir en 2009, enfin, le courage politique de leurs ambitions électorales de 2007. Je ne suis malheureusement pas certain de pouvoir compter sur ce courage-là de leur part...

jeudi 19 mars 2009

Liberté chérie

Dans le sillage de mon billet d'hier, je voudrais reproduire ici les passages les plus pertinents de l'appel lancé par le collectif liberté chérie et qui va totalement dans le sens de "ce que je crois".

"Ce jeudi 19 mars 2009, les professionnels subventionnés de la grève et des blocages sauvages remettent ça. Comme lors de la journée du 29 janvier 2009, nous devons donc rappeler ce qui devrait être les priorités d'un gouvernement digne de ce nom dans un moment pareil :

  • La fin des subventions publiques aux syndicats
  • La réforme de la représentativité syndicale
  • La mise en concurrence des entreprises publiques en monopole

[...]

A l'heure où tant d'organisations qui vivent d'argent public profitent d'une crise que presque personne n'a su expliquer correctement (cf. interview de Vincent Bénard par LC Belgique) pour récupérer les inquiétudes souvent légitimes des Français...

A l'heure où nos gouvernants irresponsables préfèrent jouer le pourrissement ou céder au chantage des délinquants comme en Guadeloupe ou dans les universités, puisqu'après tout l'argent distribué ne sort pas de leurs proches...

A l'heure où des députés de la majorité se permettent de stigmatiser les entreprises bien gérées (qui font des profits) ou les individus qui ont réussi dans la vie, au lieu de s'en prendre à l'organisation la plus mal gérée de France : l'Etat...

C'est la société civile qui a tout à perdre si elle ne fait pas entendre sa voix !"

Je ne suis pas un militant de Liberté Chérie, et mon propos n'est pas de faire leur promotion. Mais il m'est apparu intéressant de mettre l'accent sur un manifeste qui fait entendre une voix dissonante dans le concert actuel où, parait-il, près de 75 % des Français approuveraient les manifestations de rues et les grèves...

mercredi 18 mars 2009

Aux armes, citoyens !

Et c'est reparti ! On devrait en avoir l'habitude, et je ne devrais même pas écrire sur le sujet, devenu d'une banalité à pleurer : demain 19 mars 2009 sera un nouveau jour de mobilisation syndicale. Entendez par là une nouvelle journée de galère pour les travailleurs (ceux qui bossent, pas les autres évidemment), de blocage pour l'économie française, de manque à gagner pour les entreprises, et par conséquent pour le trésor public, c'est à dire pour les citoyens, c'est à dire y compris pour les grévistes eux-mêmes. Mais sont-ils tous à même de réfléchir jusque là ?

En temps de crise (et celle-là, c'en est une !), on pourrait s'attendre à ce que tout le monde relève ses manches. Quand un orage se lève, le réflexe est de mettre à l'abri les objets sensibles à l'eau, pas d'arroser copieusement pour en rajouter...

Et bien, il faut croire que nous n'avons pas fait la bonne école, tous ceux qui comme moi pensent dans ces termes-là ! Soutenus par 74 % des Français selon un
sondage dont on nous rebat les oreilles, tout ce qui compte de forces soi-disant "progressistes" dans ce pays se mobilise pour ... cesser le travail et bloquer l'activité !

On va sans doute encore me reprocher de "taper sur les syndicats", dont je serais paraît-il un adversaire inconditionnel. Il n'en est rien, et ceux qui me connaissent savent que je les considère comme des institutions indispensables au bon fonctionnement de la démocratie. Encore faudrait-il qu'ils soient responsables et qu'ils restent dans leur rôle, deux conditions qui ne sont pas réunies en France, où ils ne savent que défendre leurs intérêts corporatistes respectifs au mépris des intérêts de ceux qu'ils sont sensés représenter. Les organisations en question n'ont de syndicats que le nom. La raison première en est sans doute leur trop faible représentativité, mais ce problème n'est pas celui que je me propose de traiter aujourd'hui.

Et d'ailleurs le sujet de ce billet déborde de beaucoup le cadre de l'action syndicale.

Car cette grève n'en est pas une au sens strict. Il ne s'agit pas, en effet, de faire pression sur un ou des employeur(s) pour obtenir des avantages ou pour les conserver. Il s'agit tout bonnement de faire pression sur le patronat, les pouvoirs publics, et en résumé sur tous les centres de pouvoir, pour en obtenir ce que l'activité économique n'offre plus suffisamment dans cette période de crise.

En d'autre termes, il s'agit tout bonnement d'une
grève contre la crise. Voilà un concept tout à fait novateur ! A quand une grève contre les mauvaises conditions météorologiques, l'épidémide de sida ou encore la pollution ?...

La réalité est bien plus prosaïque et beaucoup plus inadmissible encore : les syndicats sont totalement sortis de leur rôle, et il s'agit là d'une grève politique qui ne veut pas dire son nom.

La grève du 29 janvier dernier, sur le même thème, avait amené le "sommet social" du 18 février au cours duquel le gouvernement avait accepté 2,6 milliards d'euros de
mesures de relance par la consommation. Je n'ai pas besoin de répéter ici ce que je pense de telles mesures : totalement inefficaces sur le long ou même le moyen terme, et uniquement un cautère sur une jambe de bois à court terme, qui donne l'illusion, mais l'illusion seulement, d'un coup de pouce. Mais c'est ce que demandaient les "partenaires sociaux". C'est ce qu'ils ont obtenu. Et c'est ce qu'ils considèrent évidemment insuffisant...

Ils avaient prévu le "mouvement" du 19 mars dès avant ce sommet. Ils l'ont confirmé quasi immédiatement. Pas étonnant que Laurence Parisot dénonce "leur démagogie", même si je ne tiens pas à prendre exagérément position pour le Medef, qui n'est pas exempt lui non plus de critiques...

Il reste que, comme je l'ai dit plus haut, ce mouvement de grèves est politique avant d'être revendicatif. Il n'est qu'à voir les positions prises par les partis d'opposition, du PS au NPA et passant par le PC ou même le Modem. Le mot d'ordre est simple et récurant : le "tout sauf Sarko" de la campagne présidentielle n'est pas mort avec l'élection, et tous tentent de récupérer l'action pseudo-syndicale à leur profit. A commencer par Besancenot, qui s'est pourtant fait remonter les bretelles de son bleu de chauffe par François Chérèque.

Il est vrai que le danger venant de lui est des plus importants : la face cachée du mouvement est bel et bien la lutte contre un système, le capitalisme libéral, dont le parti du petit facteur poupin de Neuilly se fait le pourfendeur. Et il est bien normal que les forts en math de la planète rouge (ou rose) refusent une telle mise en facteur commun...

Plus sérieusement, on peut à bon droit se demander si tout ce beau monde est de bonne foi ou s'il ne fait que "surfer" sur la vague de mécontentement que provoque la crise économique. Car les difficultés sont évidentes, et il ne s'agit nullement de les nier. Il existe des situations catastrophiques pour nombre de nos concitoyens. Ca en signifie pas que des solutions existent pour tout le monde. Ca ne signifie pas non plus qu'il faille ne rien faire pour personne. Le gouvernement en a pris la mesure, ce me semble, et aussi inefficaces à moyen terme qu'elles puissent être, les mesures annoncées le 18 février vont dans le bon sens à très court terme. Et celles qui avaient été décidées avant, en soutien à l'investissement, auront sans doute encore bien plus d'effets. Elles auraient dû être de nature à permettre de calmer les esprits. Les responsables politiques comme syndicaux ont fait tout l'inverse. C'est le signe de leur incompétence et de leur inconséquence. Malheureusement, ils ne seront pas les seuls à en subir les dommages...

Car ce mouvement de mauvaise humeur ne résoudra évidemment rien, bien au contraire. Il n'assagira pas, par exemple, les manifestants radicaux de l'enseignement supérieur, ni ne feront cesser leurs exactions. Il ne résoudra pas non plus les problèmes rencontrés par l'usager des services publics, pourtant soi-disant "défendus" par les coureurs de rues de tout poil. Il ne pourra évidemment que favoriser les revendications inconsidérées et démagogiques de tous ordres, trop souvent relayées par les ministres eux-mêmes, que leur "patron" doit recadrer régulièrement.

Et en tout état de cause, il ne pourra que porter un nouveau mauvais coup à l'activité de nos entreprises, dont les dirigeants syndicalistes devraient pourtant être les premiers à savoir qu'elles sont les seuls garantes de la sortie de crise, et dès lors d'un bon niveau d'emploi et de pouvoir d'achat retrouvé pour leurs adhérents. Ce n'est certes pas en pénalisant leur activité qu'ils rendront service à leurs ouailles. Mais je suis convaincu qu'ils le savent très bien, et qu'ils disent le contraire dans le seul but de justifier leur propre existance, incapables qu'ils sont de le faire autrement...

Heureusement, malgré tous les reproches que j'adresse régulièrement à nos dirigeants, ils semblent sur ce coup-là vouloir garder le bon cap, et on peut espérer, raisonnablement toutefois (ils nous ont déjà souvent surpris dans le mauvais sens), qu'ils sauront s'y maintenir.

Certains maladroits appellent aux armes les citoyens. Leur jour de gloire n'est pas encore arrivé...

vendredi 13 mars 2009

Welcome

Je sais bien qu'on est déjà vendredi, et que l'actualité court à toutes jambes au point que presque plus personne ne prend le temps d'analyser vraiment, se contentant dans le meilleur des cas de réactions épidermiques là où il faudrait, au contraire, se poser des questions et chercher les réponses... C'est ce que, pour ma part, j'essaie de faire quand je réussis à en trouver le temps. Et c'est ce que je vais faire ici, même si beaucoup de mes lecteurs ont sans doute déjà tourné la page.

De quoi s'agit-il ? Du film Welcome, sorti sur nos écrans mercredi, et qui a suscité une vraie polémique. Ou plus exactement de cette polémique elle-même. Car je n'ai pas vu le film, et je ne sais pas s'il mérite le tohu-bohu qu'on a fait autour de lui. Ne serait-ce pas seulement une opération de promotion ? Ou bien les différentes interventions étaient-elles sincères ? Dans ce cas, on peut se poser bien des questions (encore...) sur les intervenants...

Le sujet est sensible : tourné à Calais, le film traite de l'immigration clandestine et des citoyens français qui aident illégalement les clandestins.

Tout a commencé par une interview de Philippe Lioret dans les colonnes du Nouvel Observateur, où le réalisateur du film dénonce ce qui est à ses yeux un scandale. Il y avait eu avant une interview du même Philippe Lioret dans La Voix du Nord au cours duquel il déclarait : "J'ai comme le sentiment d'avoir raconté l'histoire d'un type qui a protégé un juif dans sa cave, en 1943".

Eric Besson, ministre de l'immigration, s'indigne aussitôt à juste titre. D'abord sur FR3 ("Ce soir ou jamais" du 2 mars) puis quelques jours plus tard sur Europe 1. Il accuse Philippe Lioret de "dérapage volontaire". On pourra aussi lire à ce sujet, par exemple, les interviews du même Eric Besson dans le Nouvel Obs. du 7 mars ou dans Télérama du 12 mars.

Il s'en est suivi une déferlante médiatique, où nombre d'acteurs, réalisateurs, et autres journalistes, prennent la défense du réalisateur, et en profitent pour prendre position et dénoncer à leur tour leur "scandale des migrants".

Encore une fois, je n'ai pas vu le film. Je n'ai fait qu'entendre les critiques et quelques spectateurs. Je ne m'autorise donc pas à juger de son contenu, et je me bornerai à traiter du problème des "migrants", nouveau terme édulcoré utilisé en lieu et place de celui d'immigrés clandestins, ce dernier beaucoup plus conforme cependant à la réalité du phénomène.

Je ne reviendrai pas une nouvelle fois sur ce que je pense de l'immigration. J'en ai traité ici et . Je n'ai rien à ajouter ni à retirer à ces deux billets.

Ce qui me pousse à écrire aujourd'hui est le sujet de la polémique : est-il légitime de poursuivre les citoyens qui aident les clandestins à se maintenir dans la clandestinité ?

Je n'ai que deux ou trois choses à dire sur le sujet, mais je tiens à les dire :

  1. Il est absolument indigne et scandaleux qu'un grand pays comme la France laisse vivre ces pauvres gens, victimes pour l'écrasante majorité d'entre eux de leurs "passeurs", dans les conditions de dénuement et de détresse, dans lesquelles ils se trouvent du fait de leur clandestinité. J'habite à quelques kilomètres de Calais, et il m'a été donné à de nombreuses reprises de le constater. Il y a vraiment de quoi avoir honte.
    Selon moi :
    - ou bien le clandestin n'a pas vocation à rester sur le territoire français pour toutes les raisons découlant de la législation française en vigueur, et il doit être expulsé sans délai vers son pays d'origine
    - ou bien cette expulsion n'est pas possible pour quelque raison que ce soit, et il doit être régularisé.
  2. Il est tout à fait normal que la loi réprime l'aide apportée aux clandestins dans le but de les cacher aux autorités de police. Toute entrave à la justice est condamnable, et celle-ci ne fait pas exception à la règle.
    Cependant :
    - Ca n'exclue pas de leur apporter à manger, à boire, à s'abriter, à se laver. Tout ceci relève de l'assistance à personne en danger.
    - Les dénoncer ou non aux autorités relève du libre arbitre de chacun. Je ne vois pas qu'il soit condamnable de se taire. On n'a pas affaire à des criminels, que je sache...
    - Mais les cacher volontairement et les aider sciemment à échapper aux contrôles n'est pas admissible. Que dirait-on de celui qui cacherait un cambrioleur ? Ou un incendiaire ? Peu importe la nature du délit, et protéger un délinquant est délictueux. Le simple citoyen n'a pas qualité pour juger de la gravité du délit. C'est à la justice, et à elle seule, de le faire.
  3. MAIS assimiler, comme l'a fait Philippe Lioret, la législation sur l'immigration clandestine aux lois antijuives de Vichy est proprement scandaleux.
    C'est faire insulte à l'héroïsme des résistants de l'époque qui, eux, ne protégeaient pas des délinquants de l'action de la justice. Ils protégeaient, au péril de leur propre vie, des innocents persécutés par un régime scélérat qui a fait des millions de victimes.
    Parallèlement, c'est assimiler le code pénal républicain à des lois immondes basées sur une idéologie raciste et criminelle. C'est tout simplement inepte. Et, pire, c'est porter atteinte à l'honneur du législateur.
    On a le droit de contester le bien fondé d'une disposition législative ou réglementaire ; on a le droit de manifester sa désapprobation ; on a le droit de vociférer ; on a même le droit de hurler dans les rues pour le dire. Nous sommes en démocratie, et on a le droit de s'exprimer. Certains diront "peut-être un peu trop"... Mais on n'a pas le droit de dire n'importe quoi, d'insulter qui que ce soit en publique, ni de porter atteinte à l'honneur de qui que ce soit.

Non, monsieur Lioret, vous n'avez pas le droit de parler comme vous l'avez fait. Vous n'avez pas le droit de porter un jugement aussi lourd qu'infondé sur la justice de votre pays. Votre film peut bien être un chef d'oeuvre. Il restera toujours entaché de vos propos.

mercredi 11 mars 2009

Bienvenue

Bienvenue sur mon blog nouvelle formule !

Mon ancienne plateforme (Canalblog) ne me donnait pas assez de latitude, à commencer par l'accès au code HTML...
J'espère que vous ne serez pas trop déroutés par la nouvelle présentation.
Le contenu ne sera pas affecté. Et je souhaite que vous veniez toujours aussi nombreux.
Très cordialement.

samedi 7 mars 2009

Tous fonctionnaires

La presse et les médias nous ont abreuvé pendant plus d'un mois de commentaires et de reportages, autant dithyrambiques que partiaux pour la plupart, au sujet des évènements que vient de vivre la Guadeloupe, mais à mon avis sans jamais aborder le problème le plus crucial que pose, non pas le mouvement en lui-même, mais la solution qui a été mise en oeuvre.
Et comme la Martinique a emboîté le pas de sa soeur caraïbe, que la Réunion vient d'enclencher son propre mimétisme, et que vraissemblablement les mêmes causes produiront les mêmes effets, c'est à dire que les "solutions de sortie de crise" seront sans doute, dans les deux cas, de la même eau qu'à Basse Terre, le phénomène ne fera qu'empirer.
On a entendu de nombreuses prises de positions, de nombreuses pseudo-explications, dont certaines contradictoires, en fonction notamment du positionnement politique de ceux ou de celles qui réagissaient dans les médias, journalistes ou hommes et femmes politiques.
Pour ma part, n'étant pas un spécialiste de l'économie des DOM-TOM, je me garderai bien de me prononcer sur les motifs profonds qui ont engendré le mouvement de grève et les manifestations de grogne qui ont enflammé ce département français pendant un mois et demi. Je ne me prononcerai évidemment pas plus sur leur bienfondé, et je me contenterai de dire ce qu'ils m'ont inspiré au long cours, au travers de ce que les journaux et la télévision nous ont distillé, c'est à dire au travers du prisme déformant de ces "faiseurs d'actualité" pas plus objectifs dans cette affaire qu'ils ne le sont habituellement, et donc avec toutes les réserves qu'il convient d'y mettre.
Tout d'abord, il m'est apparu évident, dans les reportages que j'ai pu voir, qu'il existe là-bas un problème social qui s'appuie sur deux pôles : un chômage éminemment plus important et un coût de la vie beaucoup plus élevé (de l'ordre de 40 % si j'ai bien compris) qu'en Métropole. Raison d'un "sur-salaire" de 40 % au bénéfice des fonctionnaires métropolitains en poste en Outre-Mer, "prime" qui pourrait bien, du reste, être contre-performante en ce qu'elle serait de nature à maintenir des prix élevés...
Ces deux facteurs seraient, nous dit-on, la base du problème. Je n'en suis pas si sûr : à entendre les vociférations de nombre de manifestants interrogés, il m'est apparu plus évident encore que cet état de fait n'avait servi que de détonateur, et que l'explosion était due essentiellement à la rancoeur des populations autochtones (si l'on peut dire, car issues de l'esclavage) à l'encontre des "Békés", c'est à dire de la classe dominante (économiquement et politiquement si j'ai bien compris) composée essentiellement des descendants des colons.
Cette impression, ressentie à l'écoute de beaucoup de commentaires de la population noire interrogée lors des reportages, vient d'ailleurs recouper ce qui m'a été relaté par plusieurs personnes de mon entourage qui avaient fait là-bas des voyages de villégiature, et qui m'avaient toutes rapporté que les populations noires donnaient le sentiment de n'avoir pas "tourné la page" de l'esclavage, et que leur rancoeur à l'égard de "l'homme blanc", et donc du "Béké" comme du Métropolitain, était demeurée entière. Encore une fois, je ne fais que rapporter des propos entendus, et dire ce que j'ai ressenti devant mon poste de TV. Ce n'est en aucune façon un jugement de valeur.
La question subsidiaire que je me suis posée, et que je me pose toujours à l'heure qu'il est, est de savoir s'il est pertinent de traiter ces territoires français situés à l'autre bout du monde de la même manière que s'ils étaient à quelques encâblures de la capitale. La départementalisation, telle qu'elle a été menée, n'était-elle pas, par nature, le germe des difficultés que connaissent ces îles aujourd'hui ? Ne serait-il pas plus pertinent de prendre pleinement en compte leurs spécificités, et celles de l'économie locale ? Est-il pertinent de ravitailler ces départements-là depuis la Métropole, c'est à dire à 8000 Km de distance, au lieu de le faire depuis le continent américain, situé beaucoup plus près ? Et pourquoi ne pas développer localement la production des biens de consommation chaque fois que c'est possible ? Je pense par exemple aux cultures vivrières. J'insiste sur le fait que ce ne sont là que des questions. Je n'ai pas les réponses. Mais ces questions-là sont en elles-mêmes importantes.
Beaucoup de mes lecteurs vont se demander, à ce stade, pourquoi j'ai "pris la plume" sur un sujet qui ne m'inspire que des questions, quasiment aucune réponse, et même aucune prise de position. J'y arrive.
Ce qui me choque le plus dans cette affaire, ce ne sont pas les troubles, le mouvement de grève, les manifestations (même si des exactions autant impordonnables qu'inutiles ont été commises "des deux côtés"), la manière dont les négociations ont été (mal)menées par le gouvernement comme par le patronat, ni même le ton carrément subversif et guerrier des slogans utilisés par le LKP. Tout ceci est plus que regrettable, et à certains égard condamnable, mais malheureusement habituel, même en Métropole, quand (c'est devenu la règle) un mouvement de revendication syndical ou social se transforme en combat politique.
Non, ce qui me heurte et qui est d'une gravité dont personne ne semble être encore conscient, c'est la nature de la solution qui a été trouvée. Car, mine de rien, il s'agit tout simplement d'un changement de régime. Pour la première fois dans l'histoire de la République Française, l'état se substitue aux entreprises dans le paiement d'une partie du salaire.
Ce n'est pas anodin, et c'est même un cataclysme politique. Quand j'ai entendu la revendication, je me suis dit, naïvement confiant, que nos dirigeants n'allaient certainement pas être suffisamment fous pour aller dans cette direction, et qu'ils allaient refuser tout net. Au lieu de ça, Yves Jego accepte, puis rappelé et désavoué par François Fillion, fait marche arrière, avant que, quelques nuits d'émeutes plus tard, le même François Fillion ne "mange son chapeau" et n'accepte, partiellement certes, mais accepte quand même les "exigences" des insurgés.
La valse-hésitation, en elle-même, n'a plus rien de choquant. On a maintenant l'habitude de voir nos fanfarons de Matignon ou de l'Elysée dire tout et faire le contraire de tout. Mais ce qui l'est, choquant, c'est la nature de l'accord conclu.
Car, de quoi s'agit-il exactement ? Les Guadeloupéens demandaient, depuis l'origine des troubles, un rattrapage de 200 € des "bas salaires" (1,6 fois le Smic quand même !), au motif de la chèreté de la vie locale. Jusque là, rien de choquant avant analyse : il s'agissait d'une revendication comme on en a entendu des centaines, justifiées ou non, peu importe sur le fond.
Mais le Medef local se refusant catégoriquement à cette augmentation des salaires, les émeutiers se sont mis à "exiger" que l'Etat Français paie ce que les entreprises ne voulaient pas payer. C'est cette "exigence" que Jego a eu l'imprudence d'accepter à demi-mot, avec le désaveu de Fillion suivi de, finalement, l'acception de ce dernier. Les 200 € en question seront versés, à raison de 100 € par l'état, à raison de 50 € par les collectivités locales (ce qui fait donc 150 € par mois sur des fonds publics), et seulement à raison des 50 € restants par les entreprises. Encore que toutes n'ont pas accepté cet accord. On peut donc craindre que les choses n'empirent encore...
On ne peut pas imaginer un instant que Matignon ait donné son feu vert sans l'accord de l'Elysée, et c'est donc in fine Nicolas Sarkozy, ce Président qu'on nous présente comme un libéral forcené, qui a fait basculer la République dans un gouffre collectiviste que je prévois sans fond.
Car n'en doutons pas, la Martinique et la Réunion suivront la Guadeloupe et exigeront le même traitement. Et, demain, pourquoi pas la Bretagne ou le Pas de Calais, où le taux de chômage et supérieur à la moyenne nationale, et pourquoi pas l'Ile de France où les prix sont plus élevés qu'ailleurs ? Et pourquoi se limiter à 200 € ? Et pourquoi se limiter à 1,4 fois le Smic (c'est finalement sur cette base que l'accord est intervenu en Guadeloupe) ? Il est bien évident que cette somme apparaîtra rapidement comme insuffisante, voire ridicule, aux yeux de tous ceux qui ont des fins de mois difficiles, y compris quand c'est à cause de leur propre mode vie ? Où s'arrêter, quand la machine est en route et quand le sentiment est cultivé qu'il suffit de descendre dans la rue pour obtenir quelque chose ?...
Après le déficit incontrôlé de la Sécurité Sociale; après le déficit pas plus contrôlé du budget de l'état; après le droit opposable au logement; après les subventions pharaoniques accordées aux secteurs en difficulté; après autant de postures propres à conforter le sentiment que l'état peut tout financer, et que les finances publiques sont inépuisables; une fois installées les habitudes du recours systématique à ces finances publiques pour boucher les "trous" de mauvaise gestion, que ce soit dans les entreprises, dans les administrations, ou pire encore chez les particuliers (voir pour s'en convaincre les statistiques du RMI et de l'assurance chômage. Voir surtout leurs durées moyennes d'indemnisation); après toute cette gabegie institutionnalisée, gageons que nous baignerons rapidement dans un système où l'état ne cessera de subvenir aux besoins les plus divers et variés, en donnant d'une main ce que, bien entendu, il sera bien obligé de reprendre de l'autre. Et où l'état sera donc, de facto, celui qui décidera à qui donner, et combien donner.
Ce système porte un nom : cela s'appelle le collectivisme. De l'Union Soviétique à ses pays "satellites", de Cuba à la Corée du Nord, et à la Chine avant qu'elle ne prenne un virage salutaire qu'elle n'a pas encore terminé de négocier, on sait tous pourtant que ce système ne conduit qu'à la misère, et accessoirement à la dictature.
Bien sûr on n'en est pas encore là. Bien sûr je vais me faire traiter de tous les noms en évoquant ce spectre. Bien sûr ce n'est pas dans les intentions de nos dirigeants. Bien sûr on n'a fait que mettre une première phalange dans l'engrenage...
Mais cette phalange-là y est bel et bien, et le risque est énorme sur le plan politique. Il ne l'est pas moins sur le plan des mentalités. Car elles sont hautement maléables, surtout dans le sens du moindre effort. Et l'expérience a prouvé à maintes reprises qu'il était difficile, voire souvent impossible, de revenir en arrière. Le candidat Sarkozy avait dénoncé la "culture du RMI" et avait prôné la "valeur travail". Le président qu'il est devenu institutionalise aujourd'hui la culture de l'assistanat et dénie les valeurs telles que l'indépendance et la liberté inhérentes à la propriété privée, notamment celle des entreprises. Quelle sera la marge de manoeuvre d'une entreprise privée dans laquelle l'état prendra en charge une part non négligeable de la masse salariale ? Quelle sera sa liberté de gestion ? Quelle pourra être sa politique en matière d'emploi ?
Nous sommes tous, depuis longtemps, des employeurs indirects compte tenu de la masse salariale de la fonction publique, que nous finançons par nos impôts.
Demain, nous serons tous à moitié fonctionnaires. Et combien de temps encore pourra-t-on dire "à moitié" ?


Ce billet était publié sur mon ancien site. Commentaires ici

lundi 2 mars 2009

Heureux anniversaire

Une fois n'est pas coutume : je vais aujourd'hui écrire un billet pour dire que je suis content ! Ca en étonnera peut-être certains, qui ont plus l'habitude de lire sous ma plume des "coups de gueule"...
Mais j'ai un anniversaire à fêter, et un anniversaire heureux : celui du réseau LHC !
Il y a un an, en effet, que Roman Bernard, de
Criticus, a créé avec Lomig, de Expression Libre, un nouveau réseau de blogueurs. Je connaissais l'existence de plusieurs de ces réseaux, et je n'avais alors adhéré à aucun. Pourquoi ?
Essentiellement parce que je suis un individualiste convaincu, les habitués de "Ce que je crois" le savent bien. Même si je sais que "l'Union fait la Force", je sais également que la fusion crée le flou, et que se mélanger avec d'autres, de si bonne qualité soient-ils, est susceptible de créer un "écran de fumée" qui masque les détails de sa propre personnalité. Si j'avais adhéré, par exemple, aux Kiwis, j'étais vu immédiatement, de facto, comme un Kiwi, et beaucoup moins comme moi-même, avec mes spécificités propres.
Alors, quand Roman m'a contacté, dans les toutes premières heures de son nouveau réseau, pour me demander d'y adhérer, ma première réaction fut de dire "non". Et puis je suis allé lire la
charte LHC, j'ai relu sous ce nouveau jour plusieurs articles de "Criticus" et plusieurs autres de "Expression libre", j'ai lu également la lettre d'intention de Lomig (Roman n'avait pas encore publié la sienne), et j'ai eu l'impression de découvrir quelque chose de nouveau.
Visiblement, LHC naissait, non pas comme un Nième cercle nombriliste et uniquement destiné à faire la promotion de ses membres, mais prenait le contrepied, justement, de ces deux défauts, défauts que je reprochais aux réseaux existants.
Les trois valeurs de base que défend la Charte LHC sont, de plus, trois valeurs pour moi fondamentales : liberté d'expression, humanisme et esprit critique devraient être, de mon point de vue, les trois pilliers qui devraient soutenir la ligne éditoriale de tout blog digne de ce nom. Malheureusement, trop de blogueurs se passent allègrement de l'une ou de l'autre, voire des trois à la fois. Afficher clairement le parti pris de les respecter me semblait une posture très séduisante.
Et puis l'offre qui m'était faite était flatteuse, et je reconnais bien volontiers que ça a joué dans ma décision. C'est donc finalement avec enthousiasme que j'ai donné mon accord.
Quelques jours seulement plus tard, j'ai reçu un nouveau courriel du même Roman, qui me proposait d'entrer au "comité directeur" du réseau. Et là, j'ai su que quelque chose d'important venait de se produire pour moi. C'est sans hésiter, cette fois, que j'ai accepté l'honneur qui m'était fait. Car je me sens plus naturellement "acteur" que "spectateur", et assumer des responsabilités au sein du réseau était pour moi une perspective heureuse.
Un an plus tard, quel est le bilan ?
Sur le plan personnel, je n'ai jamais eu la moindre raison de regretter ma décision. Je regarde très peu les statistiques de mon blog. Je ne sais pas trop si mon "audience" a augmenté, et encore moins si son éventuelle progression est due à mon appartenance à LHC.
Ce que je sais, par contre, quand j'écris un billet, c'est qu'il aura toutes les chances d'être lu par des gens qui ont toute ma sympathie d'une part, et d'autre part par des gens qui ne partagent pas forcément mes idées (c'est peut-être pour leur "parler", plus qu'à ceux qui pensent comme moi, que j'écris) mais qui viendront quand même me lire, encouragés en celà par la qualité des blogs LHC.
Et sur le plan du réseau lui-même, le mot qui me vient naturellement à l'idée est celui de succès. Pas seulement par le nombre de ses membres (nous sommes 30 aujourd'hui), pas seulement sur le plan de l'audience, grandissante, mais aussi et peut-être surtout sur le plan de la qualité des contenus et celle des relations entre les membres.
Trop éloigné géographiquement de la capitale pour participer aux rencontres LHC parisiennes, je n'en ressens pas moins la chaleur et l'enthousiasme des relations qui se nouent, et que j'ai le sentiment de partager à distance.
Politiquement, une majorité d'entre nous sont des libéraux, mais nous comptons aussi nombre de non-libéraux, et c'est ainsi que notre réseau se rit du traditionnel et imbécile clivage gauche-droite, et que le réseau est un espace de discussion et de débats tout à fait enrichissants.
Pour résumer, j'ai tout simplement envie de prononcer le mot de réussite. Sans oublier ceux du plaisir d'en être et du bonheur d'y participer.
Vous trouverez une évocation de cet heureux anniversaire sur le
portail du réseau.
À lire aussi, les articles de
Criticus, d'Aymeric Pontier, de Libertas, de Lolik, et de Lomig.


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